L'Affaire Stavisky

L'incroyable histoire d'un homme qui escroqua toute la haute société parisienne.

Alexandre Stavisky est le fils d'un prothésiste dentaire polonais israélite. Né en Ukraine en 1886, il arrive à Paris à l'âge de 12 ans avec son père et son grand-père. 

Théâtre des Folies Marigny

Le Théâtre des Folies-Marigny à Paris est le théâtre d'une de ses premières escroqueries alors qu'il est âgé de seulement 23 ans.

En 1912, Stavisky loue le théâtre à la ville de Paris pour l'été, celui-ci étant fermé à cette saison. Stavisky publie des petites annonces dans les journaux Le Matin et le Petit Parisien pour recruter des employés : "administrateur, secrétaire, buraliste, concessionnaires buffet, fleurs, bonbons, ouvreuses, publicité pour le rideau, programme, etc." A chaque candidat il demande le paiement d'une caution pour leur permettre de payer le loyer du bail. Mais Stavisky garde pour lui l'argent, ne réglant jamais ses dettes auprès de la ville. Poursuivi en justice, la guerre éclate et il échappe de justesse à la prison...

Beau parleur et séducteur, il se marie avec Arlette Simon, ancien mannequin de chez Channel qui lui donnera deux enfants. Il développe alors son réseau pour escroquer la haute société pendant une vingtaine d'années.

Le nom de Stavisky, qui se fait appeler "le beau Sacha", apparaît déjà à Biarritz en 1926, lorsqu'il entreprend la construction d'un somptueux hôtel-casino, la Roseraie, sur la colline de la Demoiselle d'Ilbarritz à Bidart. Stavisky devient également administrateur du casino de la Pergola à Saint-Jean de Luz où il y joue gros.

En 1926, il est poursuivi par des agents de change pour avoir dérobé des titres mais réussit à s’échapper du bureau du juge d’instruction en passant par les toilettes attenantes. Repris par la police au bout de quatre mois de traque et expédié à la prison de la Santé, puis transféré à la prison de Fresnes pour raison médicale, Stavisky sera libéré en décembre 1927 sans n'avoir jamais été jugé.

Celui qui veut se faire oublier et se fait désormais appeler "Monsieur Serge Alexandre" devient administrateur de sociétés : la Compagnie Foncière d'Entreprise Générale de Travaux Publics, la Société d'Installations Mécaniques et Agricoles (SIMA), les Etablissements aéronautiques Weymann, la société de liqueur La Jurançonne, la Franco-American Cinematograph Corporation...

SIMA La Jurançonne

Il crée la société Alex qui se livre au commerce de bijoux, qui va lui permettre de mettre la main sur le Crédit Municipal d’Orléans avec la complicité du directeur. L’établissement reçoit d’abord les bijoux de sa société en gage, qui sont systématiquement surévalués par des experts. Puis Stavisky remplace les vrais bijoux par des faux qui sont ensuite restitués aux emprunteurs, tandis que les vrais sont revendus. Il émet également de faux bons de caisse. Ainsi, pendant trois ans, ce sont 70 millions de francs de bons fictifs qui seront émis !

Il recommence l'opération avec de nombreuses autres sociétés. Stavisky opère toujours de la même façon : il crée des sociétés dont la seule justification est d'obtenir de l'argent des banques en mettant en gage des bijoux. Lorsqu'il faut rembourser des actionnaires impatients, il émet de faux bons de caisse pour se renflouer.

En 1931 Stavisky qui s'est fait entretenir par de nombreuses femmes qu'il a ruinées se fait dénoncer, sans doute après s'être fait une certain nombre d'ennemis. 

"L'Affaire Stavisky" éclate la veille de Noël 1933 par l'arrestation d'un certain Gustave Tissier, directeur du Crédit Municipal de Bayonne, pour faux, usage de faux et détournement de deniers publics. 

On apprend que monsieur Tissier n'est qu'un instrument : celui de Serge Alexandre, de son vrai nom Stavisky, qui, avec la complicité du député-maire de Bayonne, Joseph Garat, a créé ce Crédit Municipal. Garat est président du Conseil d'administration de la banque. Lui aussi sera incarcéré au début de 1934 et démissionnera.

La banque a émis pour plus de 200 millions de bons de caisse, couverts par à peine 20 millions de bijoux déposés en garantie, lesquels sont faux ou surévalués. L'argent a été prêté à Stavisky, qui s'en sert pour financer ses spéculations. 

Le scandale est d'autant plus énorme qu'il se révèle que Stavisky a déjà fait l'objet de poursuites, toutes étouffées sur intervention de ministres ou de parlementaires corrompus. Moins de quinze jours plus tard, on apprend que Stavisky, qui s'est enfui et que la police traque, se serait suicidé dans une villa de Chamonix !

Son étrange mort provoque une crise politique : le gouvernement de Camille Chautemps doit démissionner laissant la place à Daladier.

Cette affaire a été exploitée par tout ce que le pays comptait d'anti-parlementaristes et d'antisémites. Des ministres et des parlementaires se sont laissés corrompre ou naïvement tromper. Ce scandale fut le détonateur de la chute du cabinet Daladier.

Le 17 janvier 1936 s’achevait le procès Stavisky, neuf hommes politiques étaient condamnés, dont le député-maire de Bayonne, et onze autres acquittés. 

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